Un bastion en temps de guerre
Une résistance par la culture

Entre les façades pastel et les pavés d’une ville marquée par l’histoire, les parquets vibre toujours sous les pas précis de jeunes danseurs. À Veseli Cherevychky, l’entraînement ne s’est jamais arrêté. Pas même lorsque les sirènes hurlent. Pas même lorsque les coupures d’électricité plongent la pièce dans l’obscurité. Ici, la danse est un acte de survie, un acte de résistance.
Depuis le début de l’invasion russe en février 2022, l’école de danse Veseli Cherevychky est devenue bien plus qu’un centre d’apprentissage. Fondée en 1991 par Marya et Volodya Chmyr pour transmettre les traditions folkloriques ukrainiennes, elle est aujourd’hui un symbole de lutte culturelle et humanitaire.
Au premier regard, cela ressemble à un simple cours de danse. Mais regardez de plus près. Les visages sont graves, les mouvements sont plus intenses, plus ancrés. Le hopak, cette danse guerrière autrefois exécutée par les Cosaques avant les batailles, n’a jamais autant ressemblé à un cri de défi.
« Nous dansons pour ceux qui ne peuvent plus le faire »
souffle Natali 23 ans , en ajustant son ruban bleu et jaune. Elle a perdu son père au front il y a six mois. Pourtant, elle continue à danser. et plus que jamais perpétuer ses connaissances.
L'école Veseli Cherevychky ne se contente pas de préserver les traditions, elle participe activement à l'effort de guerre. Face à l'afflux de réfugiés, de camions d'aide humanitaire, au flux des arrivées le bâtiment été transformées en centres d'accueil. Les élèves et les professeurs se sont mobilisés pour distribuer des vêtements et des médicaments aux déplacés.
En parallèle, l'école a organisé des levées de fonds à travers des spectacles et leurs tournées, notamment en Europe, où certains de ses jeunes danseurs ont été accueillis temporairement au début de la guerre pour y être mis en sécurité. Ces représentations permettent non seulement de récolter des fonds pour les unités de leurs proches parti au front, mais aussi de sensibiliser le monde aux souffrances du peuple ukrainien.
Les adolescents de Veseli Cherevychky ne sont plus tout à fait des enfants. Ils ont grandi trop vite, bercés par le fracas des explosions et la peur du lendemain. Pourtant, ils refusent de se laisser briser.
Certains ont passé leurs examens sous les alertes aux missiles. D’autres ont vu leurs parents partir au front et n’ont plus qu’un écran pour leur dire « bonne nuit ». Loin d’être une génération sacrifiée, ils sont déjà en train de bâtir l’Ukraine de demain.
L’UNHCR estimait en février 2025 que plus de 6,3 millions d’Ukrainiens étaient encore réfugiés en Europe (Toute l’Europe). Parmi eux, d’anciens élèves de Veseli Cherevychky, exilés mais toujours liés à leur école, portant la culture ukrainienne à travers le monde.
Et après ?
Que reste-t-il quand une guerre vous a tout pris, ou presque ? La vie.
Les mariages n’ont pas cessé, parfois sur le front, parfois dans des abris. Des bébés naissent dans l’ombre des ruines, symboles criants d’un avenir que l’ennemi ne pourra pas voler.
« On a compris que la guerre ne s’arrêterait pas pour nous. Alors on n’a pas arrêté non plus. »
Anya, danseuse de la troupe qui est revenue Ukraine avec la tournée en France de 2023.